lundi 19 janvier 2015

5 - Campement dans le désert du Shekhawati










Le désert du Thar nous ouvre ses portes. Nous pénétrons dans une région semi-désertique, où des arbres, aujourd'hui dépourvus de feuilles, se disputent l'espace avec de maigres arbustes de couleur grise. Une atmosphère poussiéreuse virevolte et se dépose sur l'horizon, jusqu'à le rendre brumeux. Nous avançons lentement sur une étroite piste, bordée de personnages avachis sur des petits lits de lanières tressées. Nous nous perdons dans un dernier village encombrés de vaches immobiles, d'enfants hilares nous adressant un bonjour de la main, et de groupes d'hommes jouant aux cartes. Arrivés à notre camp de tentes, nous sommes accueillis par le traditionnel colliers de fleurs odorantes. Tout autour de nous, du sable, et une végétation clairsemée mais encore présente.

Le dromadaire qui nous conduit sur ses terres est bien docile. Il semble depuis longtemps habitué à ces étrangers venus découvrir son désert. Il avance avec une sérénité princière, tête haute, en signe de défi, comme pour nous rappeler que c'est bien lui qui conduit la troupe. Ses pas, à la fois lourds et feutrés, déposent leurs empreintes éphémères dans le sable brun. Doucement, le soleil entame sa descente journalière, offrant des couleurs changeantes au gré des dunes et des petits valons escarpés. De nombreuses antilopes croisent au loin notre route, laissant apercevoir leur pelage zébrée et leurs cornes dressées. Le silence n'est rompu que par les cris du chamelier guidant son animal, déconcentré par de verts et appétissants arbustes. Une, deux, puis trois antilopes viennent côtoyer notre petit convoi. C'est l'au-revoir au soleil qui se couche, au jour qui va s'offrir à d'autres. Le soleil, transformé en une formidable boule rouge suspendue, plonge inexorablement derrière les monts sableux, pour ne devenir qu'un trait de lumière confondu avec l'horizon. Le tableau se charge d'ombres, de mouvements à peine perceptibles, et de chuchotements. Ce jour est passé...


 ... La nuit a pris définitivement place au dessus du désert, et les artistes entrent en scène.
La lumière des deux braseros joue de ses couleurs sur le groupe du musiciens assis en demi-cercle. Le traditionnel harmonium à soufflet à bras donne le départ d'un petit concert de musiques et danses du Rajasthan. Nous allons profiter de ce début de nuit en plein désert, pour déguster de bons plats indiens, en écoutant les musiciens. Les trois danseuses font voler leurs robes de tissus écarlates, en tournant sur elles mêmes  faisant rythmer leurs pas avec les mouvements circulaires de leurs poignets. La mélodie des petites cymbales se confond avec le bruit saccadé de leurs nombreux bracelets de bras et de chevilles. Leurs envolées gracieuses jurent avec le visage grave du joueur d'harmonium, barré par une imposante moustache qui lui donne l'apparence du guerrier Rajput. Un deuxième, tout en rondeur, jovial,  s'empare d'un instrument à corde traditionnel, et s'amuse à jouer en notre honneur, quelques notes de «J'ai du bon tabac». La plus âgée des danseuses, dans la pure tradition des amuseurs saltimbanques du Rajasthan, empile sur sa tête de nombreux vases de terre, et se met à marcher successivement sur du verre brisé et des planches de clous renversés. Ce spectacle dédié à une poignée de touristes à la recherche d'authenticité, sans aucun doute rejouer des centaines de fois, et peut être à  mille lieux des vraies traditions, n'en demeure pas moins un moment agréable. La lumière des deux braseros devenue tremblotante et hésitante, disparaît peu à peu, comme un deuxième coucher de soleil, sur cette nuit au désert.
 Texte Henry Lavesque - Photos Fabienne Lavesque






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