mercredi 30 septembre 2020

Bretagne Sud - 13

Le sel de Guérande

Au matin, c'est un crachin transporté par un vent doux, qui nous accompagne jusqu'à Kerhinet. Le seul moyen d'accéder au village est à pied. Kerhinet est un village habité, reconstitution exacte des villages anciens de la Brière. Les maisons basses sont abritées des éléments par un toit de chaume, habilement confectionné. L'ensemble est très champêtre. On peut se faire clairement une idée, sur les conditions de vie de ces paysans, à une époque pas si ancienne que cela. 



Un petit saut de puce, et nous voilà devant les remparts de Guérande. Le crachin s'est maintenant transformé en un pluie épaisse. Nous trouvons refuge dans une crêperie, pour attendre et espérer que le soleil revienne. Le temps d'une bonne crêpe, et voilà que la lumière change, l'ondée s'estompe, et le ciel vire au bleu. Guérande possède son avatar dans le sud de la France, avec Aigues-Mortes. C'est une petite ville médiévale, ceinte de remparts, de belles portes aux quatre coins, et tout autour, les marais salants. Qui ne connait pas le sel de Guérande ? La promenade dans les ruelles pavées permet de découvrir mille créations artisanales, les boutiques sont légion, et les commerçants fort accueillants. Nous allons quitter le sol breton prochainement. Nous faisons les dernières emplettes, biscuits, caramel salé, et autres croquants, tout en profitant des riches maisons de pierre, succédant à des modestes maisons à colombage.



Quelques kilomètres plus tard, nous décidons de faire une rapide étape à Batz sur mer. Nous avons prévu d'y passer une petite heure, en fait, nous y dormirons, tant la petite ville nous séduit.  

Nous descendons à la plage Saint Michel, un écrin d'eau transparente, encadré de surprenantes petites cabines de bain couleur canari. Sans crier gare, une dame d'un âge vraiment avancé, se dévêt, nous dépasse, et se jette à l'eau sans la moindre hésitation. Quelques brasses plus tard, la voilà déjà à la limite des dernières bouées. L'eau doit être à peine à quatorze degrés. La crique est surveillée par la pierre haute, une sorte de menhir de trois mètres de haut, qui servait, autrefois, de point de repère pour les bateaux.  Nous achevons notre balade du front de mer, et cherchons un endroit paisible pour la nuit. Un petit emplacement bien caché, à l'orée d'un parc, nous tend les bras. 




Les vélos sortis, nous filons faire le circuit de huit kilomètres autour des marais salants. Le soleil est avec nous, il faut en profiter. Mais, au bout de trois kilomètres, nous sommes surpris et arrosés par une averse soudaine, avant que le soleil ne revienne éclairer les derniers kilomètres. La balade à bicyclette permet de traverser les marais salants par le milieu, surprendre les aigrettes, comprendre le tissu complexe des canaux. Nous parvenons à Kervalet, pittoresque village de "paludiers" (les ramasseurs de sels). Enfilade de maisons colorées, surmontées de leur lucarne surgissant du toit. C'est par là que les paludiers emmagasinaient le foin et les graines pour l'hiver.





De retour à Batz sur mer, nous nous offrons un tour complet du village, abandonné par les voitures, à cette heure tardive. Nous retrouvons la plage Saint Michel, avec ses maisons à balconnets bleus, verts, rouges... tournés vers l'horizon comme espérant le retour d'un être aimé. 

La nuit, en un coup d'éponge radical, vient effacer les couleurs au tableau. Les vélos sont rangés, le repas est chaud, la veillée se prépare. 

 

mardi 29 septembre 2020

Bretagne Sud - 12

 

Le charme de Saint-Cado

Ce matin, nous quittons Quiberon, pour ce qui sera notre dernière destination dans les terres du Morbihan. Deux petits villages sont au programme : Etel et Saint-Cado. 

Etel est un petit bourg, à la rue centrale descendant jusqu'à la rivière du même nom. Les locaux parlent de la ria. La rivière pénètre largement et profondément. Le quai, à la fois de pêcheurs et de plaisance, accueille de nombreux bateaux, qui se serrent au plus près. Face au marché à la criée, sur le sable, de vieux thoniers croupissent au soleil. Leur bois brunit, s'émiette, s'évanouit. C'est le cimetière des thoniers, eux-même successeurs des sardiniers qui avaient fait la renommée d'Etel. La large rivière ouvre un horizon vers lesquels des embarcations, grandes ou modestes, s'en vont affronter le vent. La plupart des commerces sont fermées. Nous sommes lundi et hors saison. Nous trouvons une boulangerie qui propose le pain du pêcheur, à la croute délicieusement croustillante et roussie. Nous en achetons une part, avec un far breton pour le déjeuner.  

 

Il est treize heures lorsque nous arrivons à Saint-Cado. Un perle dans son écrin. La ria remonte jusqu'à Saint-Cado, pour se perdre dans les terres. Ici, très peu de voiture, le visiteur vient à pied, et c'est tant mieux. La vision du village, en arrivant du sentier côtier, est douce. Face au petit pont, une image retrouvée dans de nombreux guides touristiques, celle de la petite maison de l'île de Nichtarguer. Plutôt un îlot, de vingt cinq mètres de diamètre à marée haute. La petite bâtisse aux volets bleus était la maison du gardien du parc ostréicole. Aujourd'hui, elle fait la joie des photographes et autres aquarellistes. Les couleurs changeantes du ciel, ajoutent un charme indéniable à ce site. Le pont de pierre qui permet d’accéder à la chapelle, est, dit-on, l’œuvre du diable. Saint-Cado, venu du Pays de Galles, pour s'installer dans le bourg, y avait fait bâtir sa chapelle mais, par marée haute, on ne pouvait y accéder. Il fît construire un pont, qui ne pût lutter contre les assauts de l'eau. Le diable lui proposa alors de l'aider, mais à une condition. Lorsque l'ouvrage sera achevé, il exigera qu'on lui remette la première âme qui le franchira. Saint-Cado fit traverser un chat. 

La chapelle est à l'image du lieu, bien ancrée, évasée, belle. L'intérieur est fascinant. Les murs épais, éclairés d'une lumière tranquille, tamisée par des vitraux aux décors naïfs, protègent une atmosphère paisible. Une piéta accueille le visiteur. La pierre au mur et au sol apporte une seine fraicheur. Le plus surprenant est le plafond, en forme de bateau renversé, peint de couleur bleue, et traversé de poutres noires. L'ensemble, délivre un lieu austère, mais suffisamment accueillant pour en faire un lieu de prière, de méditation, de silence. Face à la chapelle, un magnifique et imposant calvaire, élevé par trois montées d'escaliers. Quatre piliers entourent la croix, surmontés d'ange.  La chapelle et le calvaire ajouté, laissent imaginer la ferveur et la crainte des paysans et des pêcheurs, lors des grandes cérémonies religieuses, dans les années lointaines. La promenade au cœur du village est accompagnée de belles photographies racontant la vie, noir et blanc, du village, au temps où le trop dur labeur empêchait l'instruction. Au bord de la rivière, une belle fontaine de pierre s'écoule dans le ria. Surmontée d'un croix celte, elle date du XVIIIème siècle.






 

Pourtant bien petit, le village de Saint-Cado nous retient plus d'une heure. il est temps de poursuivre notre route, vers Guérande. En chemin, nous ferons un petit détours par La Roche-Bernard, avec son vieux quartier abritant les artisans partis en vacances, et son interminable port, qui s'allonge à se perdre dans les bois.




La nuit s'avance doucement lorsque nous garons notre fourgon, aux premières maisons du petit village de Kerhinet.