lundi 21 janvier 2019

004 - Vinales, à l'ombre des mogotes

Il est neuf heures du matin. Le ciel est d'un gris profond. Seul un petit air encore frais se glisse entre les larges feuilles des bananiers, après le vent violent de la nuit. La température semble idéale pour le programme de la journée.
La table est mise sous le auvent de la terrasse, et la toile cirée à grosses fleurs, nous présente un alléchant petit-déjeuner. Café cubain bien noir, lait ou thé, accompagnent pêle-mêle, jambon, petites crêpes, pain sucré, omelette, œufs brouillés, miel, tartines, beurre, et différents fruits du verger familial : ananas, bananes, papayes. Autant de vitamines indispensables pour affronter notre chemin de randonnée.
Solides et hautes chaussures aux pieds, sacs à dos fermés, nous quittons nos hôtes, non sans avoir au préalable programmer le menu de notre « comida » (dîner).
A peine sortis de la maison, nous empruntons un chemin de terre bordé de maisons d'hôtes (casas particulares), rivalisant de couleurs vives. Les chambres d'hôtes se sont multipliées à Vinales, répondant à une demande toujours plus importante de touristes. Leur confort s'est également considérablement amélioré. On trouve désormais facilement des chambres avec salles de bains indépendantes, et même beaucoup de chambres, totalement indépendantes de la maison des propriétaires. Sorte de petite maison à côté de la maison principale. Les rues adjacentes de l'avenue principale du village sont composées d'une multitude de ces maisons d'hôtes. Leurs extérieurs sont toujours entretenus avec application, et l'on se sent vite les bienvenus. Nous croisons cubaines et cubains, à pied, à vélo, même à cheval, se rendant à la ville pour le travail ou pour les achats du matin. L'ambiance est joyeuse, amicale . L'atmosphère d'une petite ville de province, loin du tumulte bruyant des grandes cités. Les portes de chaque maison sont grandes ouvertes, les gens se saluent, entrent pour prendre des nouvelles. Les petites écolières et les écoliers arborent leurs uniformes rouge blanc, bleu, ou blanc et marron, selon leur niveau d'étude, et s'en vont en riant vers l'école voisine, insouciants. Chacun prend des chemins différents, et nous, pris par cet enthousiasme matinal, nous nous enfonçons davantage dans les champs et la campagne environnante. La terre rouge et meuble, alourdie par les pluies de la veille, colle à nos semelles. Sans guide, nous avançons entre les plantations de bananiers, maïs, maniocs et caféiers. Devant nos hésitations à choisir le bon sentier, des paysans portant de larges chapeaux de paille, cigare aux lèvres, nous remettent dans la bonne direction avec un léger sourire, qui sous-entend beaucoup de choses. Au bout de quelques minutes, nous voici au cœur même du décor qui fait la renommée de Vinales. Les vallées des plantations de tabac, avec les champs de tabac d'un vert limpide, les fincas et les séchoirs. Les paires de bœufs tirant le soc qui déchire la terre, avançant péniblement sous les cris de soutien du paysan. Les ramasseurs de tabac, récoltant deux par deux les précieuses feuilles, pour ensuite les empiler sur les bâtons de séchage. Les chevaux et les vaches paissant en liberté dans des prairies verdoyantes. Tout cela à l'ombre des majestueuses et imposantes mogotes, compose un magnifique tableau sur lequel dansent les couleurs variables des avancées du jour. Le vent est maintenant totalement tombé. Le soleil se joint à la fête. Nous grimpons de légers vallons, pour ensuite redescendre en douceur dans de petites vallées, dominées par l'arbre national cubain, la ceiba. Dans une petite finca, nous prenons quelques minutes de repos, en nous rafraîchissant d'un  délicieux jus d'ananas de la récolte. Plus loin, des chevaux nous dépassent, transportant leur lot de touristes venus de tous les horizons. Tout le monde se dit bonjour dans sa langue natale, et les sourires répondent aux sourires. La paix règne dans cette vallée. On s'y sent si loin de tout, à l'abri,comme protégés. Une véritable randonnée de jouvence. On y trouve une véritable sérénité, qui revigore. Et, tout à coup, on sait pourquoi on est venus se perdre jusqu'ici, dans la vallée de Vinales. 
Chacun, y voit ce qu'il veut  y voir, y ressent ce qu'il veut ressentir ? Ne serait-ce pas cela que l'on nomme liberté ?





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